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Chemins de deuil
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Chemins de deuil
18 avril 2007

La culpabilité (2)

La culpabilité me prend dans ses serres et je souffre parfois durement. Le sentiment de ne pas avoir été toujours à la hauteur et l'idée qu'Iris a souffert moralement dans ses derniers instants au point d'en arriver à l'acte ultime ravage par moment mon coeur.

En fait cette culpabilité est aussi une révélation du désir de contrôle selon certains auteurs. Et je me rends compte alors que je souffre de ne pas avoir pu empêcher cet acte final, de ne pas avoir pu intervenir, de ne pas avoir pu "interdire", de ne pas avoir pu m'interposer entre Iris et la mort. La culpabilité devient progressivement regret puis impuissance selon Monbourquette, prêtre-psychologue chrétien.

Souffrirais-je donc de mon impuissance à contrôler ? C'est possible.

Quels sont les moyens pour sortir de cette spirale infernale ?

Un premier moyen est la méditation de la deuxième loi de vie décrite par Simone Pacot dans son livre Reviens à la vie: l'acceptation de la condition humaine.

Tu es créé, tu n'es pas Dieu, Dieu seul est Dieu. Tu es fils ou fille de Dieu. Tu es créé et aimé dans les limites propres à tout humain, à tout ce qui a pris forme. Accept ta condition de créature en toutes ses dimensions. Ne convoite pas la divinité.

Effectivement, je constate que ma souffrance est liée à cette croyance diffuse que j'aurais dû tout prévoir et être parfait. Or cela équivaut à se croire dieu, à se croire tout-puissant. Or l'être humain que je suis est limité et ne vit pas l'état de perfection ! J'ai reçu une prière à lire dans mon travail de deuil sur la culpabilité et celle-ci m'encourage à dire: j'ai fait ce que j'ai pu... J'ai moi envie de dire: je n'ai pas tout fait ce que j'ai pu. Pourtant, même cette confession renvoie mon image d'être humain limité. J'ai donc à accepter ces limites liés à mon être physique et psychologique. Ma personnalité comprend des failles, des zones d'ombre que je ne peux totalement éviter car je suis homme. J'ai énormément de peine à intégrer cela dans la vie quotidienne. J'y arrive après un grand moment de méditation mais l'essentiel m'échappe rapidement...

La toute-puissance est la non-acceptation par l'être humain des limites de sa condition. "La toute-puissance consiste à quitter la condition humaine pour accéder à ce que l'on n'est pas: devenir dieux" L'être humain va alors se passer de Dieu ou se prendre pour Dieu. Simone Pacot et Xavier Thévenot (même livre).

Pourtant j'ai déjà choisi de rester à ma position d'être humain et de donner sa place à Dieu. Mais régulièrement, nous avons à re-choisir ...ce choix. Dans le deuil que je vis, je perçois que Dieu m'invite à laisser aller ce que je ne comprends pas. Il me rappelle aussi, et vendredi saint n'est pas encore loin, que son fils Jésus Christ a pris sur lui, s'est laissé accusé, pour mes manquements humains, pour ce que je n'ai pas pu faire ou même pas voulu faire. Dieu m'aime tel que je suis, en tant qu'être humain perfectible qui a sa zone d'ombre et même parfois de ténèbre.

Cela s'appelle la grâce qui est le cadeau immérité par excellence. Et là aussi mon être se rebelle à cet idée: je crois encore que je dois mériter l'amour, le pardon. Je me bats intérieurement inconsciemment ou même consciemment contre ce principe si étranger à la nature humaine. Pourtant, c'est à cela que nous sommes tous appelé: accepter la grâce...

Comme tout ce qui est manifesté dans la forme, la chair, l'être humain est soumis à des limites. Cela fait partie de la normalité. S'il le sait, s'il apprend à reconnaître et à gérer ses limites, il va être rétabli à sa juste place. Il va d'abord entrer dans la certitude que, puisqu'il est créé dans la condition humaine et donc dans des limites, il est aimé tel qu'il est, à l'intérieur de son histoire, de ses fragilités, de sa vulnérabilité. C'est une grande et bonne nouvelle, un immense soulagement. (Simone Pacot)

Ainsi donc, mon chemin est véritablement celui du lâcher prise et de l'acceptation de la grâce. Lâcher prise quant au pourquoi et à la décision d'Iris. Acceptation de la grâce face à mes manquements. Quand je médite tout cela, quand je laisse venir en moi l'Esprit de Dieu, quand je consens à recevoir gratuitement l'amour de Dieu, mon coeur s'apaise et la culpabilité s'enfuit.

Il me reste pourtant cette insoutenable vision de la souffrance d'Iris dans ses derniers moments. Rien que d'y penser me fait couler des larmes. Je voulais tant l'aimer et la rendre heureuse que ces ultimes instants s'élèvent encore comme une accusation d'un échec irrémédiable. Mais là aussi une douce voix m'encourage de laisser aller, de lâcher prise, d'accepter le pardon. Dieu s'est occupé d'Iris et maintenant elle est en paix.

Alors je me remets parfois à espérer, d'autant que mon Père céleste n'est pas avare de cadeaux dans ces temps difficiles. Sa grâce est tellement grande qu'elle me dépasse complètement. C'est ainsi qu'au fonds de cette épreuve, j'en arrive à intégrer dans mon âme une bonne nouvelle que je n'osais pas vraiment croire, si ce n'est intellectuellement: je suis aimé inconditionnellement par mon Père céleste et qui me montre qu'Il continue le chemin avec moi. Il ne m'abandonne pas parce que je suis un être humain limité et faible. Non il reste à mes côtés et m'encourage de diverses manières. C'est un sentiment bon qui se manifeste dans mon coeur malgré ma douleur. Je n'ai qu'une chose à faire: accepter, prendre simplement, avec reconnaissance. Je veux le faire.

Il devient possible, par la grâce de Dieu, de se mettre en route courageusement sur le chemin de la Pâque, de découvrir une issue de vie là où tout semblait fermé, verrouillé, de recouvrer la vue, d'entendre ce que dit la Parole, de renoncer à ce qui fait mourir, d'avoir l'audace de vivre, de renouveler la relation, de sortir de la frustration, de retrouver la paix, la joie. (Simone Pacot).

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